mardi 26 août 2014

UNE MATINÉE EN FAISANT LES COURSES

   Je l'étripe ?
  — Oui, oui et coupelle la tête — dit-elle en faisant le geste de sa main.
   — Je l'en ouvre ?
   — Eh oui, et enlevez-le les yeux. Elle dit, la même, qui est uniquement l'acheteuse, en ouvrant les siens d'une naturalité coutumière qui peut bien être d'assentiment, ou pourquoi pas une tournure coquette visant le poissonnier en vue de faire incliner la balance à sa faveur.
 
   
    Si bien que la balance a donné le juste poids (la poissonnière était par là) la main dissimulée du poissonnier a glissé dans la bourse, une autre accomplie de crevettes ; l'acheteuse sourit l'attention et remercia le geste en faisant travailler ses cils. Conclue l'actuation, tout de suite, il attend une autre cliente pour commencer autre acte.
 
   
  — Ça va ? Commence-t-elle cette fois, jusqu'à ce que l'amie démarre sans préambules ni pauses :
  J'étais désireuse de te voir pour te raconter quelque chose de stupéfiant !
   Mais non !
  Oui.
  Tu sais ?
  Non.
  Écoute-toi.
  J'écoute.
  Tu sais…
  Ce de Marianne ?
  Oui. Elle l'a arraché le cœur au pauvre.
  Et les yeux… le laissant aveugle.
  — Mais c'était d'avant.
   Évidemment. Après, il a mal fini.
    Non.
   — Tu ne crois pas ?
   — Non.
    Il s'est fait crever la tête.
    Pauvre.
   — Bon, pas pauvre du tout, il était, lui aussi.

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