mardi 19 février 2013

LE POÈTE QUI VOULAIT SE FAIRE ÉCOUTER

    Un poète de renom, dans le bar d'où il ne sort que pour aller chez-lui, jusqu'à il y revient ; bar dont tous nous qui y étions, tenons place important dans notre vie, pour, parmi d'autres choses, la plus essentielle n'est que de désaltérer notre soif de parler, rigoler, et surtout aiguiser l'aiguillon qui se cache dans nos langues, pour ainsi meilleur nous piquer les uns les autres. Je pose ce préalable, car c'est dans ce climat que se passe cette petite histoire de l’égoïste poète.
 
   Ce poète, qui insistait, insiste, toujours tous nous sommes vivants, infatigablement chaque soirée, sans répit, sans pitié, à nous réciter les poèmes fabriqués dans la nuit de la veille, c'est-à-dire, que jamais sa poésie est fraîche ; c'est ça au moins que dit l'un y parmi, celui-ci qui pèse sur lui le noble titre de maître boulanger du quartier ; ajoutant le maître, sans ambages pour ne pas laisser espace au doute, moi, j'emporte tous les matins le pain toujours chaud, demandez-vous sinon au patron; à ce que, loin que personne ne sache ce qu'elle a à voir une chose et l'autre, tout le monde hoche la tête fermant les yeux, consentant le raisonnement du boulanger, mais muets, pour ne pas se compromettre trop… peut-être. Il faut remarquer, avant de poursuivre, qu'il n'est pas question de mépris que personne ne se prête jamais écouter le poète, déjà qu'y parmi les restants, personne ne s'écoute non plus, déjà que l’ambiance est toujours surchargée de discours desquels il y a autant comme les gens qui fourmillent par là, c'est-à-dire : une totale inexistence d'auditoire.
 
    
    Une soirée, quand s'est en train d’aménager une fête dans notre bar, pourvu de quelque chose qui se prétendait orchestre, celle-ci qui à son tour était pourvue d'un microphone lequel était connecté à deux hauts-parleurs, lesquels vraiment marchaient. Tout marchait aussi, sans troubles qui ne fussent les habituelles, quant au moment le plus inattendu, d'un félin élan le poète se fait du microphone ; lui, il était là, face à face le truc, une main tenant les feuilles dans lesquelles dormait, en silence, un poème, l'autre coinçait sa proie : la technologie était à lui, il a fait à ce moment de tous nous auditoire, son auditoire, donc il commence :
    Les feuilles tombent, dans l'automne.
    Comme tombent les hommes dans le sien,
    Soit loin, soit proche, l'hiver de leur vie.
    Les arbres… 
 
    Un vieux, vieux camarade, coinçant un verre, tel qu’en cela se l'en fût la vie "un professionnel" crie à voix-nature : les « hommes » tombent dans ou en sortant des bars ! Le monde applaudit tel profond raisonnement, chacun le raisonnant de vive voix, selon ses critères… le brouhaha, vaincre la technologie. Le poète doit attendre une meilleure occasion pour ses propos si vils.   

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